Une utopie concrète

DIMANCHE, j-1

Début d’après-midi.

Ça bouchonne à l’entrée de l’école Escoulen. On arrive !

Immédiatement, l’ambiance est là, des bras se tendent pour décharger la voiture, rapide proposition d’une place où s’installer, c’est sérieux mais léger.

Ici des étaux, des enclumes, là une série de bouteilles de gaz, de grandes tables disposées à votre demande et une foison de machines, d’outils et de matériel de toutes sortes qui semblent déjà vous dire « alors, on commence bientôt ? ».

Fin d’après-midi.

Tout le monde est là, attablé autour des produits régionaux apportés par chacun. Abondance et variété, solide et liquide. Les conversations montent d’un cran. On entend déjà les paroles d’un chant choral : nous sommes là pour travailler ensemble et donner de soi.

A la nuit.

Présentation du programme et des acteurs par Alain MAILLAND avec projection de photos à l’appui. Déjà des collaborations s’imaginent.

LUNDI MATIN

Il est tôt, le ciel est serein.

Sous les arbres, la brocante est ouverte, accumulation de n’importe quoi, de fonds d’atelier, d’orphelins de la création, de mutilés de la matière, futures trésors de la fin de la semaine bientôt transmutés par des mains habiles.

Puis c’est l’ouverture du grand bal de l’Art et la Matière.

Salutations, présentations, invitations, des couples se forment et la musique commence : frous-frous des tours à bois, martelage des forgerons et des dinandiers, feulement des verriers, sanglots des disqueuses, cliquetis des machines à coudre, silence des laqueurs et du vannier, rires et chuchotements.

Durant une semaine, une partition contemporaine et improvisée va naître sous nos yeux.

Je reçois comme un cadeau merveilleux la somme de connaissances et d’expériences que chacun offre alors à la communauté.

JOURS APRÈS JOURS

Les rencontres faites, les projets établis, il faut agir vite, aller à l’essentiel, se mettre à l’ouvrage. Calme, rapidité et concentration. Les pièces se créent et s’enrichissent, fruits délicieux des apports et des échanges.

La soif de nouvelles rencontres ne s’étanche pas et les sollicitations arrivent en cascade. Comment refuser ? Une énergie nouvelle nous irrigue et nous porte, éclaircissant l’esprit, balayant les miasmes des mauvaises habitudes, de l’égoïsme, de la compétition et du chacun pour soi. Les accords de matières, formes, couleur, jusque là improbables se révèlent comme des évidences au travers de pièces collectives liant 2,3,4,5 métiers différents.

Des artistes connus pour leur maîtrise, leur technique, s’essayent à d’autres métiers d’art, avec humilité et curiosité. Les regards deviennent complices, curieux, étonnés, les mains démonstratives et solidaires.

En cours de semaine, la ruche ouvre ses portes pour un jour à un public curieux et surpris.

VENDREDI

C’est la valse folle ! Conclure, il faut conclure ! On ajuste, on assemble, la colle, les soudures, la dorure sont les produits du jour et les métalliers n’en peuvent plus de créer des socles. Toute la nuit sera nécessaire pour achever certains projets.

En coulisse, le travail de classement et de prise de vue des œuvres s’accomplit discrètement.

Pour tous, début de rangement, décompression, complicité, sérénité.

Découverte des photos prises par les photographes, reflets fidèles de la beauté des gestes, des postures et des personnes.

SAMEDI

Exposition et vente aux enchères.

Disposées sur des tables autour de la salle des fêtes, les œuvres se dévoilent à nos regards, témoignage magistral de ces rencontres.

Plus de 160 pièces uniques, singulières, florilège des pratiques les plus diverses, nimbées du même esprit de partage.

La vente aux enchères menée par Alain restera un moment privilégié de la présentation de chaque œuvre. Celles-ci seront souvent acquises par les artistes présents.

Le soir, repas de clôture, honneur aux cuisinières, fidèles praticiennes des produits naturels et du bon goût.

DÉPART

Pas de nostalgie, nous sommes trop pleins de ces instants uniques d’où germent déjà d’autres échanges.

RETOUR

La vallée de la Durance déborde de clarté, à l’image de ces 6 jours. Me reviennent en mémoire de petits flashs d’amitié, lumières intimes qui ne s’éteindront pas.

Dès l’arrivée, la boîte mail s’emplit peu à peu des messages enthousiastes  des Aventuriers d’Aiguines.

Rendez-vous dans deux ans !

Bernard GONNET , émailleur



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